interview: d’avocate à manager dans un magasin bio

 

Beaucoup de personnes n’osent pas changer de job (de vie, de lieu de vie,…) car elles ont peur du changement. Quand on s’est persuadé pendant plusieurs années qu’on allait devenir/être/faire quelque chose, il n’est pas toujours facile de changer du tout au tout.

C’est pourquoi j’ai eu envie de partager l’histoire de Victoria. A la sortie de ses études, elle commence un stage pour devenir avocate. Elle pense son avenir tout tracé mais elle réalise que cette vie ne lui convient pas… Aujourd’hui, elle est manager dans un magasin bio! Une vie qui est en accord avec elle et avec ses valeurs. Elle partage son histoire et ses conseils pour changer de voie (et de vie) dans l’article d’aujourd’hui.

 

Hello Victoria! Merci d’avoir accepté de partager ton expérience avec les lecteurs d’übuntu. Peux-tu commencer par te présenter: Quel est ton parcours scolaire? Pourquoi as-tu choisi de faire ces études?

Hello Charlotte, merci à toi! Je m’appelle donc Victoria et j’ai 26 ans. Lorsque j'étais en rhéto, à l'âge de choisir ce que j'allais étudier à la fac et donc ce que j'allais faire plus tard, j'hésitais entre des études littéraire, comme le droit, ou des études plutôt scientifiques, comme les sciences de gestion. A l'époque, j'aimais beaucoup les maths, la gestion de projets et l'économie. L'idée d'apprendre à gérer une entreprise me correspondait bien et je trouvais ça sympa. Mais j'étais également attirée par des études de droit étant donné que mes parents avaient tous les deux fait ces études-là et qu'ils m'avaient toujours dit que ça ouvrait énormément de portes. Ce qui était assez pratique pour une personne comme moi qui ne savait pas ce qu'elle voulait devenir plus tard. Après quelques recherches, j'ai appris qu'à l'université de Liège, il était possible d'étudier les 2 branches en même temps grâce à un programme spécial qui se déroule sur 6 ans, à savoir le master HEC-Droit. Je me suis donc lancée dans cette aventure et suis finalement ressortie, après 6 ans d'unif, avec un master de sciences économiques et de gestion et un master de droit en poche.

Que faire maintenant ? J'avais envie de me laisser toutes les portes ouvertes et je me suis dit qu'il fallait que je complète ma formation avec le stage au barreau -aka pour devenir avocate-, pour être certaine d'avoir toutes les cartes en main pour "plus tard" et pour avoir un beau CV. Je voulais avoir vraiment tous les choix possibles pour débuter ma carrière dans le but, ensuite, de pouvoir enfin faire ce que je veux faire. A la sortie de l'unif, je me suis donc retrouvée, ni une ni deux, dans un bureau d'avocats sur Bruxelles, en train d'éplucher les codes de droit social et de taffer pas loin de 70 heures/semaine.


Ouuuch 70h/semaine, ça fait beaucoup! Comment le vivais-tu? Et plus généralement, comment ça s’est passé dans ce bureau d’avocats?

Ce stage au barreau, je le voyais réellement comme "une ligne en plus sur mon CV". Je ne prenais aucun plaisir à travailler sur les dossiers que l'on me donnait. Je n'avais d'ailleurs aucune envie de prendre de nouveau dossier. Chaque tâche que l'on m'assignait me stressait, me donnait mal au ventre.​ En fait, je fuyais le travail. En plus, je n'avais aucune confiance en moi, ni dans ce que je faisais, dans mon travail, alors que j'avais toujours bien réussi à l'unif et à l'école en général. Pour couronner le tout, les relations entre collègues étaient malsaines, tout était très faux. Je voulais seulement faire mon stage et le terminer le plus vite possible pour après faire ce que j'avais vraiment envie de faire. Mais bon, le stage dure 3 ans donc je me disais que je devais prendre sur moi pour tenir le coup. Et puis, quand tu as une “belle place”, partir: c’est plus facile à dire qu’à faire.


Du coup, quel a été ton déclic pour changer de job? Comment cela s’est-il passé? Quelles étaient tes peurs à ce moment-là et comment les as-tu surmontées?

Le déclic a été un problème de santé. J'ai appris que j'avais une maladie, et qu'elle était certainement due au stress. Je me suis donc dit qu'il fallait que je change de vie, que je parte voyager à l'étranger, que je fasse quelque chose qui me plaise plus et qui me stresse moins. Tu sais, à ce moment-là, tu sens que quelque chose doit changer. Tu as plein de rêves mais tout te semble impossible. J’étais là dedans à 100%. Les mois passaient, je regardais vite fait les offres d'emploi par ci par là. Le confinement m'a aussi donné un peu moins de travail et un peu plus de temps libre. J'ai donc eu le temps de prendre du temps pour moi. Je faisais des choses simples mais cela me faisait un bien fou… Par exemple: aller faire des courses dans mon magasin préféré, The Barn (qui est un magasin bruxellois qui propose des produits du quotidien en vrac et en circuit court), cuisiner des petits plats sains, faire du sport, lire des livres sur la nutrition,… J’ai réalisé à quel point j’aimais tout cela et je me suis dit “Pourquoi ne pas trouver un travail dans ce secteur?”. J’ai donc commencé à regarder des offres d'emploi dans des entreprises food durables comme Kazidomi, mais rien de concluant. Je suis ensuite tombée sur une annonce de The Barn et je me suis dit "oh ben, pour le fun, je vais m'inscrire au recrutement vu que j'adore faire mes courses là-bas". Au recrutement, j'ai eu un coup de coeur immédiat pour les personnes y travaillant et pour le projet qui touchait à mes valeurs et mes passions ! 2 semaines plus tard, je recevais une offre d'emploi pour y être manager. J'ai énormément hésité à l'accepter pour des raisons financières -il faut dire que j’étais très bien payée dans le bureau d’avocats-, à cause de la crainte du jugement des autres, et aussi pour la peur de quitter le barreau, de me fermer une porte dans ma carrière, d'abandonner un métier, d'avoir fait des études pour rien, de ne pas savoir justifier auprès de mon prochain employeur que j'ai abandonné un stage avant la fin,…

J'ai finalement fait le choix de quitter le bureau et de rejoindre le Barn. J'ai pris mon courage à deux mains et j'ai écouté la petite voix au fond de moi qui me disait qu'elle crevait d'envie de bosser avec les gens qu'elle avait rencontré au recrutement, qu'elle voulait enfin être heureuse dès aujourd'hui, qu'il fallait arrêter de procrastiner, qu'elle en avait marre d'être stressée au boulot et qu'elle voulait prendre le pari de commencer cette nouvelle vie. Je me rappellerai toujours: j'étais dans ma salle de bain et j'écoutais ce discours qu'une amie m'avait envoyé -je vous mets la vidéo juste en dessous, et je vous conseille vraiment de l’écouter, c’est une pépite-. C'est après ces 10 min de vidéo que je me suis dit "OK, je vais leur dire OUI".

Waw, bravo d’avoir osé. Je suppose que ta vie a changé de tout au tout. Peux-tu me parler des impacts que cela a eu sur toi, sur ta vie, sur ton bien-être?

Je me sens désormais épanouie à 200%. Je me suis développée personnellement grâce à un coaching mis en place au Barn. J'ai grandi, évolué. J'ai pris confiance en moi et en mon travail. J'ai désormais des collègues qui sont plus que des amis. J'ai une vie équilibrée avec plein de temps libre pour vivre de mes passions et hobbys (sport, lecture, cuisine, amis, yoga, famille,...). Je re-découvre le bonheur d’avoir du temps pour soi. Le week-end, j'ai hâte d'être lundi pour revoir mes collègues ! Je vis un rêve éveillé.

Peux-tu nous expliquer en quoi consiste ton job? Quelles sont les tâches que tu préfères?

Aujourd'hui, je suis Manager chez The Barn. Je suis donc, dans un premier temps, vendeuse dans un magasin bio. Je suis donc très multi-tâches: je m’occupe de la caisse, du réassort, du déchargement des camions,… A côté, je suis également coach d’une équipe de vendeurs.euses chez The Barn: je les accompagne dans leur développement personnel au sein de l’entreprise. Et enfin, je gère une zone du magasin, le vrac, où je m’occupe entre-autre des commandes fournisseur, du marketing, et de la définition de la gamme de produits. Ce que je préfère dans mon travail, c'est le mix entre les tâches opérationnelles (travailler en tant que vendeuse en magasin) et les tâches non-opérationnelles (le coaching, la gestion de ma zone, les petites tâches ponctuelles en tant que manager), et par dessus tout, l'équilibre que j'ai trouvé : un travail de 35 heures/semaine qui me permet d'avoir énormément de temps pour moi, pour ma famille, pour mon sport et mes amis. C'est ça la vraie vie !

Aujourd’hui, ça fait plus d’un an que tu as changé de voie.. Avec le recul, es-tu toujours contente de ta décision? 

Oui, absolument ! Je me projette encore plusieurs années dans ce travail et, si je devais le quitter, ce serait certainement pour aller vers une entreprise aussi humaine, bienveillante et partageant mes valeurs.

Que conseilles-tu aux gens qui, comme toi, veulent changer de boulot?

Profitez de la vie. Elle se passe, ici et maintenant. Il faut arrêter de procrastiner ses rêves et vivre chaque jour comme si c'était le dernier. Le bonheur, c'est de trouver un sens à sa vie, selon moi. Personnellement, je l'ai trouvé en faisant un métier plein de valeurs, qui me fait vibrer et qui me fait grandir chaque jour. On oublie souvent qu’on passe la majorité de son temps au boulot: on travaille 5 jours sur 7, on passe plus de temps dans notre bureau que dans notre chambre, on voit plus souvent ses collègues que son amoureux. Il est donc important d'aimer son travail, son bureau et ses collègues, si on veut être heureux. Je vis enfin de ma passion et j'ai hâte d'aller travailler. Si vous voulez penser la même chose que moi, trouvez ce que vous aimez profondément faire et osez écouter cette petite voix intérieure qui vous dit "mais ce serait le rêve d'en faire mon métier" et faites-le ! La vie, on n'en n'a qu'une. Alors, autant en profiter 😬

Suivant
Suivant

Se poser les bonnes questions